Bicyclette GAC de femme
Il faut rappeler que la fabrication de vélos et le cyclisme sont très enracinés dans l’histoire d’Eibar et l’origine se trouve, on s’en doute, dans l’industrie armurière. Après la crise de l’armurerie au début du XXe siècle, de nombreux fabricants décident d’adapter leurs anciennes machines aux nouvelles nécessités. Dans ce secteur, on distingue de grandes entreprises comme GAC, Orbea et BH, sans oublier d’autres ateliers plus modestes mais qui réalisèrent un travail important : Nicolas Arregui, Zeus, Cil, Gamma, Abelux et Echasa-Fenix.
L’âge d’or du cyclisme à Eibar se situe entre les années 1952 et 1974, pendant lesquelles se distinguèrent des cyclistes notables comme Cándido Arrizabalaga surnommé « Apotxiano », José Mardaras Nazabal, Andrés Arriaga dit « Basarri » et Félix Gojenola. Mais ici, nous tenons à souligner le nom de María Magunacelaya, une des meilleures femmes cyclistes de l’époque, qui remporta d’ailleurs plusieurs courses.
María naquit à Ermua en 1904. On lui donna le surnom de Maoma, comme son père. Très jeune, elle commença à travailler à la fabrication de cartouches, avec son père, et apprit aussi à monter à bicyclette, vers 1925, quand elle prenait la GAC de son frère. Comme à cette époque très peu de femmes montaient à bicyclette, elle eut à subir les insultes de ses contemporains. Quand la Guerre Civile se termina, elle troqua le vélo contre la moto ; il était très habituel de la voir avec sa Lambretta. Cette femme extraordinaire est décédée en l’an 2000 et ses cendres ont été éparpillées à Arrate.
En dehors de leur facette de cycliste, les femmes ont aussi joué un rôle très important dans la fabrication de bicyclettes où elles étaient monteuses, fileteuses (peignant et apportant les dernières touches au vélo) et empaqueteuses. Selon le recensement du milieu du XXe siècle, 6% des travailleurs étaient des femmes, un pourcentage qui pourtant devait être supérieur en réalité. Les différences entre femmes et hommes étaient importantes, surtout en matière de salaires, droits, congés et catégorie professionnelle.
Il faut par ailleurs mentionner que l’entreprise GAC fut pionnière dans l’embauche de femmes dans ses ateliers, aux environs de 1925. Fondée par la famille Gárate en 1892, elle se consacra à ses débuts à la fabrication d’armes, notamment de pistolets automatiques et de révolvers à barillet oscillant, mais aussi de rifles et de carabines. En 1897, sa dénomination d’atelier, avec 32 ouvriers, passa à celle de fabrique. Après la première Guerre Mondiale, ils furent obligés de se réinventer et de se diversifier et commencèrent ainsi en 1927 à fabriquer des bicyclettes. Pour cela, il leur suffisait de reconvertir les machines qu’ils utilisaient pour fabriquer les canons des armes. En 1930, ils abandonnèrent complètement la fabrication d’armes pour se concentrer uniquement sur les vélos.
La bicyclette que nous avons choisie comme pièce du mois présente le cadre caractéristique des vélos de femme, elle est de couleur grenat avec de fines rayures blanches sur le cadre et les garde-boues. On observe l’écusson de la GAC sur la barre verticale sous la selle et la plaque d’identification de l’entreprise sur la barre verticale sous le guidon. Une autre des caractéristiques des vélos de femme de cette époque est le « pare-jupe », un accessoire placé sur la roue arrière pour empêcher que les jupes et les robes ne se prennent dans la roue.